Entre petites lampées et grandes folies, ne pas remettre à demain ce qui peut être bu aujourd'hui...
7 Octobre 2010
Champignons. Depuis quelques semaines, les forêts du
Berry sont devenues aussi encombrées que les routes du soleil en été. C'est l'automne, z'avez vu, et il a enfin plu. Du coup, tout le monde ne parle que de ça: des champignons. Et il y en a.
Preuve, des petits ramasseurs en proposent sur les marchés, des cèpes, des girolles, des trompettes, qui viennent tous, promis, juré, de Sologne. Pour une fois les vendeurs ont bien révisé leur
alphabet et pas confondu le S et le P d'un certain pays de l'Est...
Nous autres avons trouvé, mais on vous ne dira pas où, des kilos de cèpes, ceux dits de Bordeaux, des pieds rouges qui bleuissent, des raboteux orangés, que mes copains du sud surnomment des trimouilles, mais aussi des oronges, les fameuses amanites des Césars, des chanterelles d'automne ou tuyaux d'orgue, des langues de bœuf, à manger crues en vinaigrette, des pieds bleus, des coulemelles toutes jeunes, à peine épanouies, des rosés des prés, des clitocybes laqués ou améthystes ...
Et on boit quoi avec ces petites bijoux? Avec des cèpes crus, coupés en fines lamelles, simplement salés, poivrés, et arrosés de quelques gouttes d'huile de
noisette, servis à l'apéritif, on a osé la Grande Année 2002 de Bollinger. Du champagne ben oui, pourquoi pas ? Ses notes toastées, des pointes de noyaux de fruits, sa belle charpente et sa
longueur en bouche ont parfaitement joué le jeu et mis en appétit. J'en connais qui en redemandaient, des champignons...
Sur la soupe de cèpes, préparée avec les bolets orangés ( les raboteux), des pieds de têtes de nègre, revenus avec quelques oignons blancs, une pomme de terre, avant
d'additionner d'eau, de laisser cuire puis de passer au blender, pour la rendre plus mousseuse, copeaux de parmesan au moment de servir, on a sorti une cuvée Majorum 2006 de Michel Redde, un
pouilly-fumé extraordinaire de parfums, exotique en diable et tendu comme un arc. Une vraie merveille.
Avec les cèpes, les oronges, et une poêlée de petits champignons, accompagnés d'une épaisse côte de veau, saisie au tepanyaki
avant d'être finie au four, on est passé aux rouges. Crescendo. D'abord, le saint-émilion grand cru 2007 d'Antoine Moueix, 90 % merlot, le reste en cabernet franc, un vin simple, bien fait, sur
le fruit. Pour suivre, on avait carafé un châteauneuf-du-pape 2007, le Clos de l'Oratoire des Papes du Domaine Ogier, dominé par le grenache,
rond, souple, du vrai velours, plein de fruits rouges, d'épices et de notes de sous-bois, belle réponse au gras de la côte et à ses hôtes sylvestres. Enfin un 2000 de Cos d'Estournel, le château
aux pagodes de Saint-Estèphe, en provenance direct de la cave d'un copain fou de vin en général et du Cos en particulier. Là, on touchait presque du doigt un coin de paradis, et les discours
enflammés sur les retraites, le président ou le film Des hommes et des Dieux se sont calmés devant tant de beauté et d'harmonie.
Après ça, certains auraient presque mangé des champignons au dessert pour faire ouvrir un second flacon... Pour le dessert aux champignons, on attendra les truffes. On parlait d'un sorbet au diamant noir !
Pratique. La Grande Année 2002 de Bollinger, 100 euros. Clos de l'Oratoire des Papes 2007, 20,90 euros. Saint-Émilion Grand Cru 2007 d'Antoine Moueix, 9,50 euros. Cuvée Majorum de Michel Redde et fils, 35 euros. Chez les cavistes. Pour le Cos d'Estournel 2000, il faut chercher...