26 Juin 2015
#VDV 77. Il est bien gentil, ce cher André Fuster. Au prétexte que ce fou de vin a abandonné pour quelques heures ses Vitinéraires pour devenir le très provisoire président des Vendredis du Vin de juin, il nous impose un thème un brin narcissique, sorte d'onanisme métaphysique... et nous ordonne de disserter sur un vin qui nous ressemble. Est-ce qu’on a une gueule de vin, franchement ? Je vous le demande... De pochetron, des fois, ça dépend des jours, mais de vin…
Bon, alors à bien y réfléchir, un vin qui me ressemble ? Je fais semblant mais je n'ai pas réfléchi très longtemps, ben non. A chaque fois qu’on me demande, et encore dernièrement pour une radio locale, qu’elle est la bouteille de vin que j’emporterais avec moi sur une île déserte je réponds « un Jaune ». Un Vin jaune, pas un jaune à l’eau, vous voyez la différence. Oui, j’emporterai un Jaune qui me ressemble parce qu’on est jamais mieux qu’avec soi-même…
Un Jaune, pour les ignares des VdV, mais non, je blague, pas de ça ici, c’est un vin du Jura, issu d’un cépage jurassien, le savagnin, fait par des Jurasssiens dans quatre appellations jurassiennes dont une ne vinifie que ça, c'est à Château-Châlon, la plus belle reculée du monde, na !
Le Jaune, c’est cette merveille élevée six ans et six mois en fûts, sans ouillage, sans intervention, on le laisse peinard dans son tonneau, pour qu'un voile de levures se développe en surface et préserve le vin qui ne devient pas du vinaigre. Un vin de voile, c'est pas interdit ? Après quoi on lui donne un contenant bien à lui, le clavelin, 62 centilitres. La quantité récupérée pour un litre de liquide. Ce qui a disparu a été avalé, bu, englouti par les anges, encore plus pochetrons que mézigue…
Oui, il me semble que le Jaune me ressemble. Je n’ai pas besoin d’être ouillé pour me bonifier, j’aime plutôt qu’on me foute un peu la paix. Certes, je n’ai pas souvent ses atours, il y a longtemps que j’ai arrêté les robes brillantes même si je mets encore des pantalons jaunes, oui, mais pas des chemises jaunes, non, je rassure mes groupies … Au nez, le Jaune est un peu comme moi aussi, sec, un peu casse-noix, pour ne pas dire casse-bonbons. Comme moi il aime l’exotisme, les voyages, la cuisine épicée, il raffole du safran, du gingembre, du curry. Et la compagnie d’un vieux comté dégusté là-haut en regardant les montbéliardes agiter leur cloche.
Reste à espérer que, comme lui, je devienne centenaire. Et en pleine forme, pour mourir un verre de Jaune en main...