1 Février 2013
Évelyne Malnic. Sa vie sous le signe du vin a commencé dans les années 1990 et sa rencontre avec Jean Frambourt, directeur du restaurant Pétrus à Paris et président de l’Association des sommeliers de Paris, de France et du monde. Leurs projets de livres n’ont pas abouti, mais Évelyne Malnic a eu envie de continuer. « Le monde du vin est un monde de gens passionnés qui font des produits merveilleux, un monde riche de rencontres, de découvertes » commente-t-elle. Et elle a donc continué. Il y a eu un premier livre L’Accord Parfait, avec Philippe Bourguignon, plusieurs fois réédité (Éditions Le Chêne). De nombreux autres ouvrages ont suivi comme Le Guide des Fêtes du Vin (Fleurus), Bien connaître et déguster les vins (Solar), Un vin un repas (Solar)… « À chaque fois des rencontres, des amitiés comme celle avec Georges Lepré (Le vin en son palais, Solar)...» Puis Evelyne Manic a découvert les vins bio. « Cette découverte s’est doublée d’un choix militant, poursuit-elle. Je leur ai consacré trois guides. Suivis de deux guides des vins en biodynamie (voir le lien Cinq coccinelles ...). Ma croisade pour des vins sans ces icides qui tuent se prolonge enfin sur le site que j’ai créé et que j’anime plusbellelavignebio.com.» Par ailleurs, Évelyne Malnic collabore comme journaliste pour les vins du monde aux magazines professionnels français La Vigne et allemand Rebe & Wein et Der badische Winzer. Merci d'avoir pris le temps de répondre à ce questionnaire et à bientôt autour d'un bio...
- Le déclic ? Le premier verre ? À la maison le dimanche, chez mes parents, pour accompagner le gâteau de foies de volaille et le poulet rôti on buvait un aloxe-corton. Je n’ai pas de souvenir de dégustation mais ce vin me reste très cher car c’est le vin de mon père. Le premier verre déclencheur a été un sauternes 1929. Dégusté lors d’un dîner chez l’ami Frambourt. Je ne me souviens plus des vins merveilleux en juste concordance avec chaque plat, mais ce dont je me souviens c’est de ce flacon de sauternes 1929, qu’il a ouvert pour accompagner le dessert. Je ne suis pas sucrée, mais là. Ce fut un éblouissement de tous les sens, la robe magnifiquement ambrée, les arômes d’une complexité intense, admirablement fondus, qui offraient un équilibre parfait entre une sucrosité assagie et une fraîcheur toujours présente et cette finale longue, longue. Une initiation grandiose. Un vin fait pour aimer les vins.
- La devise ? "Une idée qui n’est pas dangereuse n’est pas une idée". J’aime bien aussi "c’est reculer que d’être stationnaire".
- Votre meilleur souvenir de dégustation ? Meilleur souvenir, c’est difficile à dire. En tout cas un très grand souvenir. C’était il y a quelques semaines, avec des amis très chers, devant un feu dans le foyer. Pour accompagner un vieux comté, acheté le matin même chez le fromager local, j’avais sorti un vin jaune Les Bruyères 2005 du Domaine Tissot. Quelques noix et des tranches de pain de campagne. Dans son habit jaune clair aux reflets dorés, le nez exhalait des arômes de noix, de fruits secs, des épices innombrables. La bouche, onctueuse, charmeuse, jouait la même partition. Et une longueur phénoménale, de longues minutes de sensations intenses, extrêmes. Un vin étonnant, insolite. Inoubliable.
- Cave ou armoire? Combien de bouteilles ? Cave avec un petit nombre de bouteilles, le mauvais souvenir d’une cave cambriolée à Paris avec plus de 250 bouteilles m’a ôté l’envie de collectionner ou garder pour plus tard. Dans cette cave, je conserve une cinquantaine de vins bios ou en biodynamie. Non par sectarisme mais par un goût prononcé pour ces vins. Qui, quand ils sont bons, ont un supplément d’âme. Je les trouve plus vrais, avec plus de minéralité, de goût de terroir, de vérité. Jamais ennuyeux. Des vins vivants qui racontent des histoires et qui ne sont jamais ni tout à fait les mêmes ni tout à fait autres d’un flacon à l’autre, d’un moment de dégustation à l’autre. Des plaisirs sans cesse renouvelés. Dans cette cave il y a les vins que j’aime, et d’autres que j’ai envie de découvrir. Parmi ceux que j’aime il y a des grands blancs qui savent toujours surprendre par leur minéralité, leur subtilité, leur fruit, leur sensibilité, des rieslings, des chablis, des savagnins, des savennières, des sancerres... Il y a aussi des vins de la Vallée du Rhône, du Languedoc, de Loire. J’ai également quelques vins de Toscane, ces vins qui disent la magie de des paysages magnifiques.
- Vos trois coups de cœur du moment ? En ce moment, j’aime beaucoup les vins de la Vallée du Rhône et du Languedoc, les vins du Sud. Peut-être parce qu’ils nous apportent le soleil. Dans le verre, dans le cœur.
. Domaine Les Bruyères, Entre Ciel et Terre, Crozes Hermitage 2009 rouge. Un vin impressionnant, avec son bouquet d’une rare richesse aux flaveurs de fruits rouges, fruits noirs, fleurs, épices, légère touche animal. Sa bouche joue la séduction avec sa matière ample, complexe, fruitée, florale, épicée, ses tanins soyeux et son parfait équilibre alcool/acidité. Sa finale longue, dense, ample et persistante, laisse une impression de puissance et d’harmonie.
. Domaine Gourt de Mautens, côtes-du-rhône village, Rasteau 2009, rouge. Un vin magnifique, superbe élégant et racé. Le nez intense et complexe libère une palette aromatique impressionnante de fruits rouges, fruits noirs (cassis), pointe florale, épices, note cacaotée, le tout admirablement équilibré. La bouche révèle une belle matière ample, sensuelle fruitée, épicée, soulignée par des tanins présents et soyeux qui persistent longuement et savoureusement.
. Domaine Zelige-Caravent, Fleuve Amour 2010, coteaux-du-languedoc, Pic Saint-Loup . Une cuvée de grande classe avec son nez élégant et intense qui exhale des senteurs de fruits noirs confitures alliées à des accents de thym, de poivre moulu, le tout empreint d’une belle minéralité. La bouche déroule une matière sensuelle et chaleureuse qui s’étire longuement sur des notes de fruits noirs et de fleurs de garrigue. C’est tout simplement magnifique.